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Intitule du site : Pour la Recherche n° 104-105 mars - sept. 2020; Compte Rendu de la Journée du 5 octobre 2019 : Autisme et Psychothérapie (volet 2)
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Description: Éditorial : Michel Botbol. Poursuivant la présentation de la journée scientifique que la CIPPA a organisé en Octobre 2019 à Paris pour rendre compte des travaux de recherche du pôle Autisme du Réseau de Recherches Fondées sur les Pratiques Psychothérapiques (RRFPP), et après avoir rapporté dans le précédent numéro de PLR les résultats méthodologiques et cliniques issus des données de ce travail, le présent numéro va se centrer sur l’étude détaillée des processus de changement dans les psychothérapies. L’objectif est donc de pénétrer dans l’intimité de ce processus pour étudier comment l’intervention psychothérapique produit du changement chez le patient, et donc d’aller au-delà du constat des changements cliniques distaux fondés sur l’évolution statistiquement significative de mesures d’autant plus fiables qu’elles résultent de l’application d’instruments validés. Il s’agit donc surtout d’explorer les interactions entre le thérapeute et le patient pour expliquer l’énigme scientifique que consti- tuent les changements statistiquement significatifs observés chez des enfants suivis en psychothérapie.
On entre ici dans le vif du sujet, celui qui a fondé la création du RRFPP : réunir les condi- tions méthodologiques permettant de donner un statut véritablement scientifique à l’étude des processus psychothérapiques et à leurs effets positifs cliniquement constatables, y compris chez des enfants présentant des troubles dont la nature neurodéveloppementale ne peut être ni ignorée ni négligée.
L’enjeu est évidemment important, en particulier pour les patients atteints de troubles qui restent peu accessibles à des traitements d’autre nature et en particulier pharmacologiques. La question est pourtant peu étudiée scientifiquement, probablement par crainte des sérieux obstacles méthodologiques que cela pose ; si bien qu’il est devenu classique de dénigrer les effets de ces traitements, de fermer les yeux sur l’insulte à la science que représentent certains de leurs résultats ou de disqualifier les abords psychothérapiques en général du fait de la diversité des théories sur lesquelles ils se fondent.
Dans ce contexte difficile, c’est le grand mérite de Jean Michel Thurin et des équipes avec lesquelles il travaille d’avoir relevé ce défi en s’appuyant en particulier sur les travaux de Kazdin et de l’équipe de Yale qui ont révolutionné la méthodologie d’évaluation des psy- chothérapies en dépassant les modèles qui, incapables d’apporter une aide quelconque à l’étude des processus, s’en tenaient à l’évaluation partielle et souvent peu convaincante de leurs effets distaux.
Les exposés présentés dans le précédent numéro ont montré comment cela a permis au pôle Autisme du RRFPP de faire une avancée méthodologique majeure, l’analyse micro séquentielle des séances, pour étudier ce que la partie statistique des travaux a repéré comme le nœud de l’action thérapeutique : l’interaction entre le patient et le thérapeute, c’est-à-dire la relation affective que noue l’enfant (serait-il autiste) avec le thérapeute et l’engagement du thérapeute dans cette relation.
Soutenue par un dispositif appuyant cette analyse sur un groupe de pairs et des web séminaires, cette avancée méthodologique est à la base des travaux qui sont présentés numéro à partir de l’étude détaillée du processus de change- ment psychothérapique chez un enfant (Léo) qui constitue le cas unique sur lequel ce numéro est construit. Deux points de vue permettent d’en rendre compte de façon détaillé :
• Un point de vue interne constitué d’une part par l’article de Sylvie Reignier qui rend compte de l’ajustement de la thé- rapeute dans la relation thérapeutique avec l’enfant et d’autre part les articles produits par les membres du groupe de pairs et du web séminaire (Marie-Michelle Narzabal, Flora Solans, Christine Ritter et Monique Thurin), qui l’accompagnent dans son travail de microanalyse séquentiel ;
• et un point de vue externe (ou pour mieux dire, Meta) appor- té par Jean Michel Thurin d’une part et Lisa Ouss d’autre part, qui, sur des bases différentes mais de façon complémentaire, témoignent de la solidité de la démarche et de son potentiel dans la recherche d’une validation scientifique d’intuitions cli- niques partagées.
Comme le lecteur le constatera, ces apports permettent de comprendre le processus de changement qui se développe dans la psychothérapie de Léo tout en soulevant des questions cruciales sur le rapport à la science des psychothérapies qui, dans l’interaction avec le patient, font appel aux interprétations subjectives du thérapeute, c’est-à-dire aux inférences qu’il fait en fonction des théories qui fondent sa pratique. En intégrant ces théories dans les facteurs qui définissent le cadre de la recherche (les modérateurs et médiateurs dans la méthodo- logie de Kazdin), l’analyse micro séquentielle du contenu des séances permet de repérer les mécanismes de changement de la psychothérapie (et leurs médiateurs) sans que cela soit conditionné par la validation préalable de la théorie de référence du thérapeute. C’est en effet sur la toile de fond construite par les modérateurs de la psychothérapie à étudier que surviennent les événements élémentaires dont la micro-analyse permet de repérer les modulateurs. Savoir à quel endroit de l’interaction patient-thérapeute l’interprétation verbalisée exerce son action est évidemment une question : agit-elle surtout sur l’enfant qui malgré ses handicaps cognitifs éventuels en comprend suffisamment quelque chose pour que cela le conduise à un changement ? ou agit-elle surtout sur le thérapeute dont elle viendrait à la fois manifester et nourrir la pensée dans un contexte où il se sent menacé par le vide qu’induit en lui sa relation avec cet enfant et son retrait relationnel ? Mais pour interessante qu’elle soit épistémologiquement, cette question ne concerne pas directement l’évaluation du changement dès lors que c’est l’interaction entre l’enfant et le thérapeute qui est au centre du processus mutatif. C’est ce dont la recherche rend compte avec une minutie et une précision telle qu’elle conduit le lecteur attentif à plonger dans cet univers interactif et dans la réalité des mouvements psychiques qui y sont à l’œuvre.
Motscles: PourLaRecherche, clinique psychodynamique, évaluation, psychose, psychopathologie, autisme, méthodologie, analyse micro séquentielle, psychanalyse, psychothérapie, développement
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