Psychotropes : Étude sur la Dépakine (3)
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Date: September 12, 2016 10:51AM
Medidscoop /Les Echos 12/09/2016
« Dépakine : 15.000 enfants subiraient des séquelles »
Solveig Godeluck s’interroge dans Les Echos : « Combien de victimes du valproate de sodium ? Selon l'épidémiologiste Catherine Hill, en 48 ans, au moins 12.000 enfants pourraient avoir été atteints de troubles neurologiques et 3.000 de malformations du fait de la Dépakine et de ses dérivés ou génériques ». « Ce médicament imprudemment administré aux femmes enceintes épileptiques ou bipolaires s'est avéré hautement toxique pour le fœtus. Mais la prise de conscience a été tardive », rappelle la journaliste. Solveig Godeluck observe ainsi qu’« on commence juste à avoir une idée de l'ampleur des dégâts sanitaires, et des ratés du système de pharmaco-vigilance. Au début du mois, une étude conjointe de l'Assurance-maladie et de l'Agence de sécurité nationale du médicament a estimé le nombre de grossesses exposées à 14.322 entre 2007 et 2014. Une nouvelle enquête est en cours pour estimer l'état des 8.701 enfants nés vivants sur cette période. Elle sera livrée vers la fin de l'année ». La journaliste explique que « pour faire ses calculs, Catherine Hill s'est servie des données sur les grossesses 2007-2014 ainsi que des chiffres de vente de Dépakine et assimilés - de 3 millions de boîtes en 1983 à 11 millions en 2005, puis 10 millions en 2015. « Sur la période, Catherine Hill a estimé le nombre de grossesses exposées à plus de 50.000, dont seulement 30.000 ayant donné lieu à une naissance viable. En effet, le nombre d'avortements et d'enfants morts-nés est particulièrement élevé avec ces grossesses à risques. L'épidémiologiste a ensuite calculé le nombre d'enfants malades sachant que le risque de malformation s'élève à 10% des naissances, et celui de troubles neurologiques à 40% », poursuit Solveig Godeluck. Elle rappelle en outre que « Marisol Touraine a reconnu la responsabilité de l'Etat et a promis que les victimes seraient indemnisées «rapidement et simplement» via un fonds ad hoc qui sera voté avec le budget de la Sécurité sociale en octobre ». Solveig Godeluck ajoute que « le rapporteur du budget de la Sécurité sociale à l'Assemblée, le député Gérard Bapt, plaide lui pour la création d'un fonds pérenne dédié à l'ensemble des accidents sanitaires et financé par une taxe sur les produits de santé. Mais la ministre a jugé qu'il ne serait «pas très juste ni très moral» que les autres laboratoires paient pour ceux qui ont fauté. Seuls les contribuables sont sûrs de devoir mettre la main à la poche ». Dans un entretien, Catherine Hill déclare notamment que « la pharmaco-vigilance ne fonctionne pas. On fait des erreurs de logique. On élimine à tort des notifications spontanées réalisées par les médecins sur le terrain, sous prétexte qu'il manque des informations, ou bien plus grave, sous prétexte que l'on ne sait pas imputer les dégâts observés à l'exposition rapportée. Le système interdit ainsi toute découverte de nouveaux problèmes ». « On exige aussi des niveaux de preuve totalement déraisonnables. Par exemple, on écarte systématiquement les cas où la victime a consommé plusieurs médicaments simultanément. On a aussi négligé des études alarmantes parce qu'elles portaient sur un nombre trop faible d'enfants », remarque l'épidémiologiste. Elle ajoute : « Je pense que c'est une mauvaise idée d'avoir confié les diagnostics des troubles neuro-développementaux à des généticiens. Leur but semble être de s'assurer que l'autisme n'est pas dû à d'autres causes que la Dépakine, pour ne pas indemniser ces cas précis. Or, si les enfants exposés in utero au valproate sont nés autistes, la cause est 100% exogène. Il n'y a aucun problème génétique à la base. On ne fera que perdre du temps et de l'argent, et faire souffrir un peu plus les familles ». Catherine Hill déclare en outre que « la responsabilité [du laboratoire Sanofi] est grande dans cette affaire. Depuis la mise sur le marché de la Dépakine en 1967, on sait que le valproate provoque des spina-bifida chez la souris. […] Sanofi a peut-être signalé ses observations à l'Agence nationale de sécurité du médicament, mais ces signalements sont noyés dans des centaines de pages de documentation... En attendant, on a continué à vendre du valproate à des femmes enceintes ».