Psychotropes : Les antidépresseurs sont peu efficaces contre la dépression de l’enfant et de l’adolescent
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Date: June 10, 2016 10:25AM
9 juin 2016. Mediscoop : Le Monde
Pascale Santi remarque dans Le Monde que « la prise en charge de la dépression de l’enfant et de l’adolescent est souvent compliquée. Une étude parue dans The Lancet […] relève que la plupart des antidépresseurs disponibles ne sont guère efficaces et ne sont pas supérieurs au placebo ».
La journaliste explique que « cette méta-analyse porte sur 34 études incluant 5.260 participants de 9 à 18 ans. Une vingtaine de spécialistes de plusieurs pays ont scruté plusieurs bases de données d’essais cliniques publiés, portant sur le traitement aigu du trouble dépressif majeur chez les enfants et les adolescents, en comparant les effets de 14 antidépresseurs sur 4 semaines de traitement ».
« Conduite par les Prs Andrea Cipriani (université d’Oxford) et Xinyu Zhou (université de Chongking, Chine), cette étude est financée par le Programme national de recherche fondamental chinois », précise Pascale Santi.
Elle souligne que « sur les 14 antidépresseurs, seule la fluoxétine (Prozac) a été plus efficace (plus d’avantages que de risques) que le placebo pour soulager les symptômes de la dépression ».
Le Pr David Cohen, chef du service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent à la Pitié Salpêtrière (AP-HP), co-auteur l’étude, rappelle ainsi qu’« il est admis depuis une dizaine d’années que les traitements médicamenteux n’ont que peu d’effets sur les dépressions de l’enfant et l’adolescent ».
Pascale Santi note que « seule la fluoxétine est autorisée en France pour la dépression de l’enfant et du jeune adolescent. La Haute autorité de santé (HAS) notait cependant fin 2014 que le rapport efficacité/effets indésirables de la fluoxétine était mal établi dans la dépression de l’enfant ».
La journaliste ajoute qu’« il y a consensus pour dire que la psychothérapie reste le traitement de première intention », mais constate que « dans les faits, c’est plus compliqué, notamment en France ».
Le pédopsychiatre Bruno Falissard (Inserm, Maison de Solenn) observe en effet : « Les antidépresseurs sont-ils des outils de première ligne, la réponse est non, le traitement de premier recours devrait être la psychothérapie. [Mais] les psychothérapies ne sont généralement pas remboursées hors de l’hôpital, les délais d’attente sont souvent de plusieurs mois dans les centres médico-psychologiques ».
Pascale Santi continue : « Malgré cela, les antidépresseurs sont largement utilisés, constatent les auteurs. Selon des études, la proportion d’enfants et d’adolescents américains prenant des antidépresseurs a augmenté de 1,3% à 1,6%, entre 2005 et 2012 et au Royaume-Uni de 0,7% à 1,1% ».
« La sertraline (Zoloft) est l’antidépresseur le plus prescrit aux Etats-Unis. En France, en revanche, cette proportion a baissé de 17% de 2007 à 2014 avec 0,28% des moins de 18 ans traités par antidépresseurs, selon les données de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) », poursuit la journaliste.
Pascale Santi souligne par ailleurs que « les effets secondaires des antidépresseurs sont souvent pointés du doigt, notamment sur le risque de suicide. Un tiers des adolescents souffrant de dépression ferait une tentative de suicide, précise la HAS. L’étude montre que le venlafaxine (Effexor) est lié à des risques accrus de pensées suicidaires ».
« Les auteurs de l’étude mettent toutefois en garde sur le biais de certaines de ces études, notamment la difficulté de lier de façon certaine pensées suicidaires ou passage à l’acte avec une prise de médicament. Dans tous les cas, la prise de médicament doit être étroitement encadrée », précise la journaliste.