La situation de la sant� mentale en France
L’organisation du dispositif psychiatrique public et associatif participant au service public repose sur la sectorisation psychiatrique. Elle regroupe l’essentiel du dispositif public, � l’exception de quelques services de psychiatrie implant�s en Centre Hospitalier Universitaire (CHU).
Fond�e sur les notions d’accessibilit� et de continuit� de soins, la sectorisation vise � promouvoir une �volution du dispositif de soins sortant d’une logique institutionnelle au profit de prises en charge diversifi�es et de proximit�, adapt�es aux besoins des patients. Les secteurs psychiatriques ont d�velopp� une gamme de modalit�s d’interventions et de soins destin�s � r�pondre aux besoins de sant� mentale des personnes adultes, enfants et adolescents, dans un territoire g�ographique donn�. Cette sectorisation a �t� envi�e et reprise parfois. La d�sinstitutionnalisation "� l'am�ricaine" n'a pas eu lieu. Les structures alternatives se sont d�velopp�es. Les services sont pass�s de 150/200 lits � 50 en moyenne; L'�volution vers la communaut� devient possible aujourd'hui.
Ainsi, plus d’un million d’adultes ont �t� suivis par les secteurs de psychiatrie g�n�rale en 1999[2] et les secteurs de psychiatrie infanto-juv�nile ont, de leur c�t�, suivi 415 770 enfants.
� c�t� de l’hospitalisation classique � plein temps et de l’hospitalisation de jour, un ensemble d’autres modes de prise en charge est offert, en ambulatoire (consultations, visites � domiciles) ou par des soins de prise en charge sp�cifiques � temps partiel (centre d’accueil th�rapeutique) ou � temps complet (accueil familial, appartement th�rapeutique).
La grande majorit� des personnes suivies par les secteurs l’est en ambulatoire : 86 % des adultes et 97 % des enfants ou adolescents en 1999.
Au sein des diff�rentes structures de prise en charge, le suivi en centre m�dico-psychologique (CMP) est le plus usuel, 73 % des adultes et 92 % des enfants suivis en ambulatoire.
D’apr�s une enqu�te de morbidit� dans les secteurs de psychiatrie r�alis�e en 1998, les hommes sont relativement plus nombreux � �tre suivis dans les structures � temps complet�: 55 % au lieu de 47 % parmi l’ensemble des personnes suivies. Ils le sont pour des affections comme la schizophr�nie (61 % d’ hommes) ou li�es � la consommation d’alcool (71 % d’hommes). Les femmes sont relativement plus nombreuses dans les structures ambulatoires (57 % de femmes) pour des pathologies comme la d�pression (68 % de femmes) ou l’anxi�t� (70 %).
La multiplication des troubles pour lesquels sont d�sormais interpell�es les �quipes de psychiatrie, et le nombre des personnes concern�es, une sur trois sur la vie enti�re, en regard d’une organisation institutionnelle qui date des ann�es 1970 et qui n’est plus totalement adapt�e aux besoins des patients imposent de refonder la politique de sant� mentale et d’en faire une priorit� de sant� publique.
En effet, si la pr�valence des maladies mentales reste stable dans la population (1% de schizophr�nies, 15% de d�pressions selon les derni�res donn�es du CREDES[3]), on observe cependant que le nombre des personnes qui consultent des psychiatres est en constante augmentation, avec par exemple 6 fois plus de d�pressions d�clar�es en 30 ans, que le taux de suicides n’a pas diminu� jusqu’en 1998, que les troubles de la personnalit� les plus graves n�cessitent d’�tre pris en charge.
Le nombre de personnes suivies a donc consid�rablement �volu�, que ce soit dans le dispositif public ou priv� (17% d’augmentation chez les lib�raux depuis 1992 et 46% dans le secteur public[4]). D’autre part, un quart des patients qui consultent en m�decine g�n�rale pr�sentent des troubles mentaux[5]. Les affections psychiatriques �taient en 1998 au premier rang des causes m�dicales � l’origine d’une attribution de pension d’invalidit�, avant l’arthrose et les tumeurs malignes[6]. Ces affections concernaient 13.591 personnes, soit 26,7% de l’effectif. Parmi elles, pr�s de 11% de l’effectif total souffraient d’�tat d�pressif ou de troubles n�vrotiques, et 6% de psychoses.
Aussi, s’il reste difficile de mesurer les besoins en sant� mentale, et si cela doit constituer un axe � d�velopper, un certain nombre d’�l�ments concordent pour affirmer la place tenue par les probl�mes de sant� mentale dans notre pays.
Globalement, l’offre de soins psychiatriques est pr�pond�rante dans le secteur public et faisant fonction de public[7] , mais in�galement r�partie selon les d�partements. La� transition d’une offre de soins, o� l’hospitalisation compl�te �tait le mode de prise en charge principal, vers davantage de soins ambulatoires (sans h�bergement) - c’est-�-dire d’un mod�le traditionnel vers un dispositif de soins de proximit�, fondement de la politique de sectorisation �labor�e dans les ann�es 1960 - n’appara�t pas achev�e dans tous les d�partements
Plus de 80 % des lits et places en psychiatrie dans les �tablissements de sant� publics
En psychiatrie, le secteur public occupe une place pr�pond�rante : il d�tient plus de 70 % des lits et places dans 81 d�partements dont 23 disposent d’une offre exclusivement publique.
En 1997, sur un total de 71 280 lits d’hospitalisation compl�te, 80 % se trouvent dans les �tablissements de sant� publics : 50 % dans les centres hospitaliers publics sp�cialis�s en psychiatrie, 12 % dans les h�pitaux psychiatriques priv�s (HPP) et 19 % dans les services de psychiatrie des �tablissements de sant� publics non sp�cialis�s en psychiatrie.
De la m�me mani�re, mais plus nettement encore que pour les lits d’hospitalisation compl�te, les places d’hospitalisation partielle sont concentr�es dans le secteur public. C’est le cas de 89 % des 27 050 places offertes en h�pitaux de jour et de nuit. Les CHS en rassemblent 54 %, les HPP 9 %, et les services de psychiatrie des h�pitaux g�n�raux pr�s de 26 %.
Des capacit�s d’hospitalisation r�duites en psychiatrie infanto-juv�nile
La r�partition des capacit�s en lits et places est in�gale entre la psychiatrie g�n�rale et la psychiatrie infanto-juv�nile, qui s’adresse aux moins de seize ans. Alors que 67 % des places d’hospitalisation partielle et plus de 95 % des lits d'hospitalisation compl�te sont r�serv�s � la psychiatrie g�n�rale, seules un tiers des places d'hospitalisation partielle et 5 % des capacit�s d'hospitalisation compl�te vont � la psychiatrie infanto-juv�nile. Ces faibles capacit�s sont d’autant plus marqu�es que les enfants et adolescents suivis en psychiatrie infanto-juv�nile repr�sentent plus de 26 % de l’ensemble des patients suivis par les secteurs. La part du secteur priv� est plus importante en hospitalisation partielle pour la psychiatrie infanto-juv�nile.
Ces diff�rences r�sultent � la fois d’un nombre de lits d’hospitalisation compl�te historiquement plus faible en psychiatrie infanto-juv�nile et du d�veloppement de modalit�s privil�giant des prises en charge des enfants et des adolescents dans les structures de proximit� : en ambulatoire (consultations, visites � domicile) ou � temps partiel (Centres d’accueil th�rapeutique � temps partiel).
En ce qui concerne sp�cifiquement les �tablissements de sant�, publics ou priv�s, la psychiatrie repr�sente 21% du total des lits, et uniquement 5% des entr�es totales, mais 80% des places d’hospitalisation partielle et 73% des admissions en hospitalisation partielle. Elle emploie une part relativement plus importante de personnel non m�dical puisqu’elle mobilise 33% des effectifs des infirmiers affect�s aux soins de courte dur�e. Les psychiatres repr�sentent, quant � eux, 13% de l’ensemble des m�decins sp�cialistes � l’h�pital et en ville.
Nombre de lits en hospitalisation compl�te en psychiatrie en 1997�
PUBLIC CHS CHG HPP |
Psychiatrie |
R�partition en % |
Psychiatrie |
|
G�n�rale (adultes) |
Infanto-juv�nile |
|||
35 727 13 284 8 378 |
50.1 18.6 11.8 |
34 479 12 624 8 191 |
1 248 660 187 |
|
Part du public sur l’ensemble en % |
� |
80.5 |
� |
� |
PRIVE Cliniques + foyers de post-cure SP priv�s |
13 184
707 |
18.5
1.0 |
12 904
609 |
280
98 |
Part du priv� sur l’ensemble en % |
� |
19.5 |
� | � |
Total Public + Priv� |
71 280 |
100.0 |
68 807 |
2 473 |
�
Champ�: France enti�re�� -�� Source�: DREES, SAE 97
Forte �volution des capacit�s d’hospitalisation dans le public, stabilit� dans le priv�
Entre 1990 et 1997, dans le secteur public, l’�volution des pratiques de prise en charge s’est traduite � la fois par une augmentation du nombre de places d’hospitalisation partielle (+25 %) et par une forte baisse du nombre de lits d’hospitalisation compl�te (-32 %). La hausse des capacit�s d’hospitalisation partielle (+ 4.861) n’a toutefois pas compens� la diminution des lits d'hospitalisation compl�te (- 26.711), d’o� un recul de la capacit� totale en lits et places de 21 % sur sept ans. Ceci s'accompagne d'un tr�s fort accroissement de l’activit� des secteurs psychiatriques, avec une augmentation de 46 % des patients suivis en psychiatrie g�n�rale entre 1989 et 1997 et de 48 % des enfants et adolescents suivis en psychiatrie infanto-juv�nile entre 1991 et 1997.
Globalement, de 1990 � 1997, la part de la capacit� totale en lits et places du secteur public a donc l�g�rement diminu�, passant de 86 % � 83 % . En revanche, dans le secteur priv�, la capacit� en lits comme en places a peu vari�.
La moyenne nationale des capacit�s d’accueil pour 100 000 habitants en psychiatrie est de 165 lits et places cumul�s. Cette capacit� est extr�mement variable d’un d�partement � un autre, puisqu’elle s’�chelonne d’un minimum de 69 dans les Hauts-de-Seine et de 78 dans le Loiret � 481 dans la Haute-Sa�ne et m�me 702 en Loz�re.
Les d�partements les mieux �quip�s,� en mati�re d’hospitalisation compl�te et partielle,� ne sont pas les m�mes
En psychiatrie g�n�rale, la moyenne nationale en hospitalisation compl�te est de 155 lits pour 100 000 habitants de 20 ans et plus. Ce chiffre masque une forte variabilit� puisqu’on observe un �cart de 1 � 10 entre les extr�mes : 5 d�partements disposent de moins de 100 lits pour 100 000 habitants de 20 ans et plus alors qu’� l’autre extr�me, 11 d�partements ont une capacit� sup�rieure � 250 lits pour 100 000 adultes.
En hospitalisation partielle, la moyenne nationale est de 42 places pour 100 000 habitants de 20 ans et plus. On constate l� encore le m�me �cart de 1 � 10 entre les valeurs extr�mes, allant de 9 places pour 100 000 habitants dans la Marne � 123 pour 100 000 habitants dans la Haute-Vienne. Un peu plus d’un quart des d�partements ont moins de 30 places pour 100 000 habitants de 20 ans et plus.
Cette variabilit� comparable n’implique pas qu’il y ait cumul ou substitution syst�matiques entre les types d’offres de soins : les d�partements les mieux dot�s en lits d’hospitalisation compl�te ne sont pas forc�ment les plus, ni d’ailleurs les moins, dot�s en places d’hospitalisation partielle.Des disparit�s encore plus fortes pour la psychiatrie infanto-juv�nile
En psychiatrie infanto-juv�nile, la situation appara�t encore plus h�t�rog�ne puisque 17 d�partements n’offrent aucun lit d’hospitalisation compl�te. M�me si ces d�partements ont plus ou moins d�velopp� des modalit�s de prise en charge alternatives, cette absence totale de capacit�s peut poser probl�me pour r�pondre aux besoins de certains patients. De plus, les �carts en mati�re d’hospitalisation partielle sont de l'ordre de 1 � 20 (de 8 places pour 100 000 habitants de moins de 20 ans dans l’Ain � 187 en Loz�re).
La France pr�sente un des taux de psychiatres les plus �lev�s au monde, de 23 pour 100 000 habitants (Apr�s la Suisse et les Etats-Unis). Il y a ainsi aujourd’hui en France plus de 12 000 psychiatres, ce qui est 4 fois plus qu’il y a 30 ans. Plus de la moiti� (54 %) exercent dans le secteur lib�ral et 46 % sont salari�s. Parmi les lib�raux, 30 % exercent une activit� hospitali�re contre 88 %
parmi les salari�s. L� aussi de forts �carts entre d�partements existent, selon une �chelle qui varie de 1 � 4 hors Paris[8] . Paris apparaissant � cet �gard comme un des extr�mes puisque la densit� y est de 80 psychiatres pour 100 000 habitants, soit 4 fois plus que la moyenne nationale�!. Malgr� cela, plus de 10% des postes du secteur public ne sont pas pourvus en France.
L’�volution de la d�mographie m�dicale laisse pr�voir une diminution de 13254 � 7856 du nombre des psychiatres d’ici � 2020.�
Evolution des effectifs de psychiatres et neuro-psychiatres lib�raux� | ||||||||
**Hospitaliers � temps plein
�
Evolution de l’activit� des psychiatres et neuro-psychiatres lib�raux� | ||||||||
�
�[2] DREES � L’offre de soins en psychiatrie : des �mod�les� diff�rents selon les d�partements �, �tudes et R�sultats n� 48, janvier 2000.
[3] CREDES ��Pr�valence et prise en charge m�dicale de la d�pression en 1996-1997�� Bulletin d’information en �conomie de la sant�, n�21, septembre 1999
[4] DREES, ibid cit
[5] Donn�es OMS - ��Mental Health in General Health Care�: an international study�� Wiley Ed. 1995
[6] Etude du d�partement statistique de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie CNAM - Juin 2001
[7] centre hospitalier sp�cialis� en psychiatrie et services de psychiatrie des h�pitaux g�n�raux) et H�pitaux psychiatriques priv�s (HPP) qui sont des �tablissements de sant� de lutte contre les maladies mentales priv�s participant au service public et habilit�s � accueillir des patients en hospitalisation sous contrainte.
[8] DREES � L’offre de soins en psychiatrie : des �mod�les� diff�rents selon les d�partements �, �tudes et R�sultats n� 48, janvier 2000.
suite
Derni�re mise � jour : lundi 9 juillet 2001 17:14:33 Dr Jean-Michel Thurin | ����������
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