Journal International de Médecine (JIM) 2/12/2016
[
www.jim.fr]
Prise en charge de l’autisme : haro sur la résolution Factuelle
Paris, le vendredi 2 décembre 2016 – La semaine prochaine, les députés devront se pencher sur un projet de résolution* porté par Daniel Fasquelle (Les Républicains) et soutenu par plusieurs élus de droite, dont Bernard Accoyer, Laurent Wauquiez et Nathalie Kosciusko-Morizet. Ce texte concerne la prise en charge de l’autisme et a pour ambition de « promouvoir une prise en charge de l’autisme basée sur les recommandations de la Haute autorité de Santé ». Ces recommandations édictées en 2012 ont constitué une rupture. Après des années de contestation de la part des associations et plusieurs remontrances du Conseil de l’Europe quant à la place trop importante de l’approche psychanalytique dans la prise en charge des jeunes patients souffrant d’autisme, une autorité française s’inscrivait enfin dans la même ligne.
Une opposition sans fin
Cependant, ce virage n’a pas été sans heurts. D’abord, ceux qui défendent l’efficacité des approches comportementalistes regrettent qu’en dépit des recommandations de la HAS, ces dernières demeurent encore marginales. Parallèlement, ceux qui ont longtemps été les seuls à prendre en charge les jeunes patients autistes dénoncent l’exclusion dont ils sont aujourd’hui la cible. Ils refusent les caricatures et rappellent que face à l’autisme, la systématisation est impossible, la solution a priori n’existe pas. Ils invitent également à ne pas sur-investir les méthodes comportementalistes dont les limites sont connues de nombreux spécialistes, notamment dans les pays anglo-saxons où elles sont mises en œuvre depuis plusieurs décennies.
Les parents d’enfants autistes pas tous représentés par les associations phares
Aussi, le projet de résolution Fasquelle qui souhaite notamment que les recommandations de la HAS deviennent « juridiquement contraignantes pour les professionnels qui travaillent avec des enfants autistes, et que seuls les thérapies et les programmes éducatifs qui sont conformes aux recommandations de la Haute Autorité de santé soient autorisés et remboursés » ou encore qui appelle à une interdiction totale du packing, hérisse de très nombreuses organisations de psychiatres, mais également certaines associations de familles touchées par l’autisme. Ces dernières, face au poids des organisations les plus médiatisées, peinent à faire entendre une voix différente.
Ainsi, père d’un jeune homme autiste, et président du RAAHP (Rassemblement pour une Approche des Autismes Humaniste et Plurielle), Patrick Sadoun se montre inquiet du projet de résolution. Il redoute l’instauration d’une médecine officielle « sous contrôle étatique ». Il s’insurge contre cette restriction de la liberté de prescription et de jugement des médecins.
Caricature
Surtout, ces parents à la perception différente et ces praticiens considèrent que le projet de résolution repose sur une méconnaissance non seulement de l’autisme mais également des différentes approches possibles. Elle s’appuierait sur une perception caricaturale de la psychiatrie et de la psychanalyse qui si elles ont pu entraîner des dérives ont également souvent été la seule réponse face à des situations inextricables.
Les positions exprimées par le gouvernement vis-à-vis de cette question si complexe de la prise en charge de l’autisme pourraient laisser augurer un accueil favorable à ce projet de résolution à moins que des considérations politiques ne fassent échouer ce projet jugé dangereux par beaucoup. Affaire à suivre.
* Rappelons qu'une résolution est une décision prise ou un avis exprimé par l'une des deux Chambres du Parlement en dehors de toute procédure législative et n'ayant pas force exécutoire.
Léa Crébat