Psychiatrie : Psychiatrie : la contention des patients, un traitement inhumain et dégradant
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Date: March 31, 2023 03:56PM
Mediscoop/Libération 31 mars 2023
Libération remarque qu’« alors que le Conseil constitutionnel doit statuer ce 31 mars autour des mesures d’isolement et de contention psychiatriques, la France renforce son système coercitif, à l’encontre des traités internationaux dénonçant ces privations de liberté », selon une tribune de Kim Reuflet, présidente du Syndicat de la magistrature, et le psychiatre Mathieu Bellahsen.
Ils écrivent ainsi : « La justice et la santé œuvrent dans la misère. Et en leur sein, la psychiatrie et la justice civile – celle qui traite en particulier des soins psychiatriques sous contrainte – trinquent particulièrement et, par là, maltraitent les patients, les justiciables et leur entourage ».
Kim Reuflet et Mathieu Bellahsen remarquent que « dans ce contexte de dépérissement, mais également à une époque de détricotage des libertés fondamentales (d’aller et de venir, de manifester, d’association…), des victoires juridiques en faveur des droits des patients sont assurément chéries, en l’occurrence ici en matière d’isolement et de contention ».
« C’est en effet majoritairement avec satisfaction, il y a un peu plus d’un an, qu’ont été accueillies les décisions du Conseil constitutionnel enjoignant le gouvernement de rendre obligatoire le contrôle judiciaire des mesures d’isolement et de contention dépassant une certaine durée, enfin analysées comme des mesures privatives de liberté », notent-ils.
Ils évoquent cependant « la misère sur le terrain. Sans surprise, cette réforme a dû être appliquée à moyens constants, de sorte que les juges, les greffiers et les équipes soignantes bricolent et s’épuisent un peu plus pour essayer de mettre en œuvre un texte écrit avec les pieds et aux effets bureaucratiques, beaucoup ayant d’ailleurs renoncé à appliquer cette loi ».
Kim Reuflet et Mathieu Bellahsen soulignent ainsi qu’« en 2021, sur les 95.000 personnes hospitalisées en psychiatrie sans leur consentement, plus de 29.000 ont été placées en chambre d’isolement et 10.000 d’entre elles ont été attachées, ces chiffres recelant des catastrophes existentielles et une perte de confiance parfois irrémédiable dans les soins ».
Ils évoquent « l’indigence des décideurs. Depuis 3 ans, à l’occasion de ces décisions en cascade du Conseil constitutionnel, le gouvernement refuse d’avoir un débat d’ampleur sur ces pratiques coercitives et n’apporte qu’une réponse exclusivement technique à ces mesures traumatisantes pour les personnes qui y sont soumises. Alors que de nombreux pays et instances internationales sont sur le chemin de l’abolition de la contention mécanique et de la décroissance des mesures d’entraves, la France renforce de son côté le système contentionnaire ».
Kim Reuflet et Mathieu Bellahsen poursuivent : « La France doit-elle se contenter du retour à un fonctionnement asilaire transformant l’emprise sur les corps des personnes psychiatrisées en «soins» ? (…) Il est urgent que s’ouvre un débat national car il en va de la dignité des personnes ayant des troubles psychiques graves, de la sauvegarde des droits humains fondamentaux et de l’avenir d’une psychiatrie ayant de réelles dimensions thérapeutiques ».